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Aux Vents des Mots
18 mars 2020

Suzuran

A

"

 

Anzu, céramiste, se consacre intensément à son art, surtout depuis son divorce. Elle vit avec son fils et ne souhaite pas se remarier, ayant été déçue les deux fois où elle est tombée amoureuse. C'est alors que sa soeur aînée, célibataire et séductrice impénitente, annonce qu'elle s'est fiancée. Suzuran est le premier volume d'un nouveau cycle romanesque d'Aki Shimazaki, qui maîtrise à la perfection la saga familiale minimaliste, le mélodrame sous euphémisme.

 

“C’était en mai 2017. Je venais de terminer Maïmaï. Alors que je lisais dans un café, j’ai entendu à une table voisine une jeune fille dire à sa compagne : « Je déteste ma sœur depuis mon enfance. » J’ignorais les détails, mais peu à peu m’est venue l’idée d’écrire sur deux sœurs.

Il me fallait d’abord un titre. Toujours, avant d’entamer un roman, je cherche en japonais un nom de fleur, d’arbre, d’oiseau, d’insecte, comme un kigo (terme du haïku : mot-clé concernant l’une des quatre saisons).

Un jour, alors que je désherbais le jardin, j’ai aperçu deux dames y entrer par l’autre bout, avec une poussette. Sans remarquer ma présence, l’une, penchée, foulait le parterre de muguet tandis que l’autre, accroupie, tirait sur quelque chose. En m’approchant, je leur ai demandé : « Mesdames, que cherchez-vous ? » Très surprises, elles se sont levées. Les deux avaient les cheveux blond foncé. « Des sœurs ? » me suis-je demandé. La première me semblait embarrassée, mais celle avec la poussette m’a lancé d’un ton sec : « C’est pour mon bébé. Ça vous dérange ? » Elle tenait un bouquet de muguet. En regardant les plantes piétinées, je lui ai répondu : « Oui, ça me dérange. » Elle m’a reproché : « Vous n’êtes pas généreuse. » L’autre semblait encore plus gênée. Je leur ai dit : « Désolée, je ne suis pas généreuse. » Les deux sont sorties précipitamment du jardin avec les fleurs. Celle avec la poussette criait, comme pour que tout le monde l’entende : « Cette dame n’est pas généreuse ! »

Le muguet s’appelle Suzuran en japonais. Après cette petite altercation, j’ai choisi ce mot comme titre du roman. En me renseignant sur cette plante, j’ai appris qu’elle était très toxique, parfois fatale. J’étais contente pour le bébé de ne pas avoir été généreuse. Ensuite, l’image d’une céramiste passionnée de son art m’est apparue à l’esprit, avec une phrase : « Tu m’appelles sans voix, comme une clochette sans battant. » Ainsi, je suis repartie pour un autre voyage imaginaire."

De Aki Shimazaki,

Actes sud, 2020,

160 pages.

 

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